Récemment, lors d’une mission de formation que j’assurais au Tchad, une infirmière qui suspectait la lèpre chez une enfant de 5 ans, m’a expliqué que l’équipe médicale l’en avait dissuadée considérant que les petits enfants sont rarement atteints. J’ai insisté pour examiner cette enfant que l’infirmière consciencieuse est partie chercher au lever du jour. Nous avons pu confirmer le diagnostic de lèpre à un stade précoce : sous traitement, elle guérira sans séquelle ! Sa maman, elle-même malade récemment guérie, l’avait sans doute contaminée.
Un autre jour, examinant un jeune garçon de 15 ans traité pour la lèpre, j’ai constaté une paralysie débutante de la main droite. L’adolescent m’a expliqué qu’il ne pouvait plus tenir convenablement son stylo et qu’il avait donc quitté l’école où il était la risée des autres élèves. Il bénéficie de séances de kinésithérapie dans un centre de réadaptation physique soutenu par la Fondation. Il a repris sa scolarité. Sans cette visite opportune il devenait un handicapé à vie et, pire, un exclu du système scolaire puis de la société.
De retour chez moi, les équipes du Tchad m’ont envoyé la photo d’un jeune garçon. Il présentait une grave atteinte de lèpre avec un visage très marqué. Derrière ce visage déchiré de vieillard… il s’agissait d’un jeune garçon de 9 ans ! Triste réalité. Ces cas démontrent l’importance de la formation sur la lèpre et le handicap notamment chez l’enfant.
Malgré les années d’effort et les succès rencontrés sur les pas de Raoul Follereau, le combat contre la lèpre n’est pas encore terminé ! Surtout dans les contrées à l’accès aux soins limité, les personnels de santé isolés sont peu formés et le niveau d’instruction des populations reste insuffisant pour sensibiliser et ainsi faciliter la lutte.
L’histoire d’Assiba, que vous avez découvert dans notre campagne 2022 pour la Journée Mondiale des malades de la lèpre, est aussi une illustration de l’action concrète que nous menons dans les pays où la lèpre continue à infecter, abimer, isoler, exclure… Les chiffres officiels sur la lèpre ne révélant que la partie émergée de l’iceberg, nous ne devons pas nous se décourager : nous devons poursuivre l’œuvre de Raoul Follereau, renforcer les compétences, aller au-devant des malades, soutenir les systèmes de santé, l’éducation et les actions de sensibilisation. Parce que la lèpre déchire encore des vies, malgré la pauvreté grandissante et l’exclusion des plus pauvres de systèmes de soins en déliquescence, un monde sans lèpre reste possible : il faut continuer à se mobiliser.