Le 24 août dernier, la ville de Barsalogho, au nord du Burkina Faso, subissait l’attaque terroriste la plus meurtrière qu’ait connue le pays, avec plusieurs centaines de victimes déplorées. Face à la détresse des enfants et des femmes réfugiés à Kaya, l’association des Sœurs Augustines de Kaya leur apporte un soutien depuis 2019.
Depuis 2015, le Burkina Faso connait une grave crise sécuritaire et humanitaire. Les attaques terroristes se sont multipliées à partir de janvier 2019, au nord et à l’est du pays, entrainant des déplacements massifs de population. Selon le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), le pays compte actuellement plus de 2,1 millions de déplacés internes.
Dans la région du Centre Nord, aux portes du Sahel, Kaya est l’une des premières villes où s’arrêtent les familles fuyant les massacres. Si les premiers arrivés, en 2019, ont pu s’installer dans des logements vacants, les familles se réfugient depuis lors sous des tentes ou des abris fournis par le HCR, ainsi des réchappés de Barsalogho.
Les enfants dits déplacés internes (EDI) ont souvent perdu un père ou une mère, et la fermeture des écoles due à l’insécurité accentue encore la précarité de leur situation – en octobre 2023, ils étaient plus d’un million à ne pas être scolarisés. Un constat qui a touché le cœur de sœur Marie-Louise Sawadogo, responsable de la communauté des Sœurs Augustines de Kaya, à son retour au pays en août 2019.
« Je pensais que ce serait provisoire »
Éducatrice, sœur Marie-Louise a voulu « faire quelque chose pour les enfants ». Avec l’accord du diocèse, en septembre 2019, elle a rouvert une école dont les bâtiments étaient fermés : au terme de l’année, 76 enfants y étaient scolarisés dont 55 issus de familles réfugiés. À l’époque, la religieuse pensait « que ce serait provisoire ». À partir de février 2020, la Fondation Raoul Follereau a répondu à sa demande et pris en charge la scolarité des enfants déplacés internes inscrits en classes de maternelle et de primaire.
Au fil des ans, les habitants de Kaya ont vu chaque nouvelle menace ou attaque dans le nord être suivie de l’arrivée de familles, à pied, les plus aisées munies de charrettes tirées par des ânes. De nouvelles classes ont été ouvertes dans l’école des religieuses et les bâtiments peu à peu agrandis, avec le soutien des partenaires. Pour la rentrée 2022-2023, la Fondation a financé la clôture de l’enceinte de l’école : « les enfants ont vu des tueries, étudier dans un espace clôturé les sécurise », témoigne sœur Marie-Louise. Depuis 2023, le forage creusé permet aux élèves et aux familles du quartier d’accéder à l’eau potable.
L’école compte actuellement 338 élèves, en grande majorité déplacés internes. L’établissement est soutenu par le ministère de l’Éducation nationale, de l’Alphabétisation et de la Promotion des Langues Nationales du Burkina Faso qui a récemment nommé un nouveau directeur, lui-même déplacé interne.
Aider les femmes à nourrir leurs familles
Scolariser les enfants déplacés internes n’était pas suffisant, un autre souci habitait la religieuse au regard clairvoyant : elle observait les femmes, seules responsables de la subsistance de leurs familles, en l’absence de leurs maris tués ou partis vers des sites aurifères. En 2020, l’Association des Sœurs Augustines a alors commencé à aider 55 femmes réfugiées à développer des activités génératrices de revenus. Soucieuses que ces dernières puissent vendre leurs produits sur le marché de la ville, sœur Marie-Louise les a mises en contact avec des habitantes de Kaya. Celles-ci leur ont appris à transformer les arachides en huile ou en pâte – grâce au moulin financé par la Fondation – et leur ont ouvert un accès au marché. En tout, plus de 300 femmes ont bénéficié du soutien de l’Association des Sœurs Augustines depuis 2020. Encore l’association aide-t-elle aussi des jeunes filles fuyant les mariages forcés, en partenariat avec le ministère de l’Action sociale, en les formant à la couture.
Un mois après le massacre de Barsalogho, sœur Marie-Louise demeure lucide quant à la menace terroriste. Il apparaît pour autant impensable à la religieuse de quitter Kaya et ses familles réfugiées :
« Je ne peux pas les abandonner. Si quelque chose doit nous arriver, ce sera ensemble. »